Ma vocation de sculpteur remonte à la petite enfance. Mon père, dompteur de fauves qui excellait dans tous les arts, sans en approfondir aucun, se divertissait en taquinant la Muse, pendant la saison creuse (au moins six mois par an). Il passait ainsi du dessin à la peinture, à la sculpture, à la création de vêtement, à la guitare manouche, à l’écriture (Les contes de Pablo ont été diffusés au début des années 70 sur RTL, raconté par Gérard Klein) etc.…Du Cirque à la SculptureDestin et Vocation
C’est en le regardant
tailler une souche de cerisier que me vint comme une évidence, l’envi
d’en faire autant. Comme si cela coulait de source comme si ma facilité
d’exécution, mes tours de main innés avaient été
appris dans une vie antérieure.
Ainsi ma voie était
tracée, je serai sculpteur et dompteur. Le dressage, art du cirque,
art éphémère par excellence faisant le pendant d’un
art plastique éternel ou presque lorsqu’il est cristallisé
dans le marbre ou le granit.
Le dressage à
l’affectif prôné par mon père était en osmose
avec les années Peace and Love (1968-1970).
Ce dressage est à
l’opposé du dressage traditionnel en force ou le dompteur domine
la meute. Un dressage jadis encouragé par les cirques propriétaires
des fauves. Dans ce type de dressage, le dompteur peut être remplacé
au pied levé par un autre dompteur. Celui-ci, connaissant les procédés
et les techniques de dressage traditionnels, était en mesure de
reprendre le numéro à son compte. L’inconvénient de
ce numéro stéréotypé est la sensation de déjà
vu sans cesse rabâché depuis un siècle (sauts
sur les tabourets, dans le cerceau enflammé … etc). Cela interdit
toute innovation qui placerait le fauve en position dominante et le dompteur
en fâcheuse posture. De nos jours les meilleurs dresseurs mixent
les deux styles de dressages et élèvent un ou deux fauves
« en douceur », ceux-la même qui constituent le clou
de leur attraction.
Ma petite soeur Belle
La relation avec l’animal
dans le dressage affectif est toute amicale. Généralement
élevé au biberon, le fauve vous considère comme l’un
des leur, faisant parti intégrante de la meute en tant que dominant.
Une relation affective s’établit alors dans l’intimité des
fauves… Qu’il était émouvant d’entendre, au loin (jusqu’à
8 km), le rugissement d’amour de Belle, qui, par son don d’ubiquité,
savait systématiquement que j’arrivai à pieds de la gare.
Avec la confiance mutuelle
tout est permis, dos tourné, bras ou tête dans la gueule du
fauve, chahut et jeux en tout genre. Ici le dompteur n’est pas interchangeable,
c’est pourquoi il est recommandé d’être au moins deux à
participer au dressage de l’animal. . Il faut signaler que l’investissement
d’un numéro de dressage à l’affectif est très lourd,
il faut plusieurs années pour constituer une attraction… Et l’angoisse
est grande quand les engagements ne viennent pas couronner tant d’efforts.
D’autant que mon père n’acceptait pas les contraintes irréalistes
et dangereuses des impresarios qui voulaient imposer trois représentations
par jour pendant les fêtes à la place de deux comme c’est
l’usage, et comme la prudence le recommande…
Quoi qu’il en soit les
fauves doivent manger, quoi qu’il arrive. La viande même impropre
à la consommation humaine et achetée en gros à Rungis
n’est pas gratuite (rien est perdu dans la boucherie, nous revendions même
les déchets d’équarrissage. Carcasses et graisse de
bœufs étaient collectées par des sociétés de
recyclage pour l’élaboration des cosmétiques)….
Comme dans toute relation « amoureuse » la jalousie dans le dressage à l’affectif peut mener au drame comme nous l’a malheureusement démontré le plus célèbre show de Las Vegas. Un grand spectacle original et surprenant, mélange de magie et de dressage, conçu par le dompteur Roy et l’illusionniste Siegfried : .Faire disparaître les fauves qu’il tenait au bout d’une chaîne était leur spécialité. Il est fort probable que l’idée de supprimer la cage et le tunnel pour s’enchaîner au fauve ait été empruntée à mon père qui innova ce procédé en 1972 à Bobino dans le numéro visuel « Belle et Pablo » en intermède du tour de chant de Pierre Perret, Dany et Boby Lapointe. Interdit pendant une semaine pour raison de sécurité, il avait obtenu une dérogation en changeant l’intitulé de son contrat, non plus comme dompteur mais comme présentateur d’animal apprivoisée…Ma maman Belle et moi
Belle et Pablo à Bobino sans cage
Roy et Siegfried se
produisaient en duo depuis plusieurs décennies à Las
Vegas et avaient amassé une fortune considérable ainsi qu’une
grande renommée aux Etats-Unis. Statufiés de leurs vivants,
ils étaient considérés comme «des Icônes
de la culture populaire américaine »… .Jusqu’au jour où
Roy s’est fait attaquer et très grièvement blessé
par son tigre en pleine représentation, le 3 octobre
2003. Il faut dire que toute modification de priorité ou de
faveur du dompteur par rapport à la hiérarchie de la meute
ainsi que l’introduction d’un nouvel individu, peut engendrer des
jalousies passionnelles. Il faut avouer que le dressage en douceur a ses
limites et que la multiplication des éléments d’une meute
ne peut qu’engendrer que des tensions. Roy, pris par la folie des grandeurs,
maintenait une communauté de 55 tigres blancs (variété
rare obtenue par sélection et croisements), 16 lions, le tout
géré par 38 assistants dévoués à
cette ménagerie. Ajouté à cela les 1500 spectateurs
journaliers du super show, les sunlights, la musique stridente, les cris,
les bravos et on comprendra qu’un fauve dans ces conditions soit plus stressé,
plus nerveux qu’en répétition et que le risque zéro
n’existe pas.
Ma première prestation
avec mon père Pablo avec Belle notre Lionne vedette faillit également
tourner au drame. A 16 ans tout laissait présager que ma vie se
partagerait entre les fauves et la sculpture. Il était donc temps
pour moi de m’accoutumer au trac que seul engendre la présentation
d’un numéro en public….
Un milliardaire organisait
dans sa superbe villa d’Antibes, pour ses amis de la jet set, une soirée
caritative pharaonique sur le thème de la Rome antique. Le cachet
du galla d’un soir dépassait celui d’un mois entier de représentations
ce qui détermina notre déplacement. A l’entrée, un
parking privé regorgeait de voitures de grand Luxe Rolls-Royce,
Lamborghini, Ferrari, ce qui me laissa ébahi d’étonnement…
Mon père gara son vieux camion cage en bout de l’allée.
Le major d’homme trouva que nous donnions une note insolite et exotique
à l’ensemble.
Au centre de l’allée,
en face de la piscine hollywoodienne, un buffet géant
d’une centaine de mètres attendait les convives avec des sangliers
entiers qui tournaient sur des broches. Sur la piscine trois scènes
suspendues étaient montées. Sur la première, une chorégraphie
de danseuses légèrement drapées, versaient des jarres
de lait d’ânesse sur le corps nu de leur maîtresse, voluptueusement
alanguies dans une baignoire de faux marbre.
Sur la seconde, des catcheurs
costumés en gladiateurs se battaient et s’entretuaient, jetant les
perdants dans la piscine, soudainement rougit par le sang des vaincus (au
jus de betterave).
Nous avions monté
la cage en plexi glas sur la troisième scène, elle brillait
de mille feux sous les sunlights, ce qui compensait à nos yeux sa
fragilité effective. Nous étions rassuré par le fait
que nous restions enchaîné à Belle notre lionne, de
la sortie du camion cage, pendant tout le spectacle, jusqu’à
notre retour. Cette organisation à nos risque et péril, nous
dispensait du long tunnel de liaison entre la scène et le camion
cage. Evidemment, l’assurance se serait désistée en cas d’accident,
à cause de ce manquement….
La fête battait
son plein, costumé en gladiateurs nous traversions l’allée
-buffet pour rejoindre la scène, un peu fébrile devant toute
cette foule où les Césars et Cléopâtre rivalisaient
avec les Alexandre, Néron et les Bacchus.
Tous les regards délaissèrent
les deux autres scènes pour la notre, la tension de l’auditoire
était palpable… Le combat simulé avec Belle commença,
elle nous fit tombé l’un après l’autre en nous saisissant
le bras dans sa gueule, nos glaives de bois tournoyaient pour nous dégager.
Elle nous reprenait avec ces énormes pattes sans que la moindre
griffe ne surgisse de ces lourds coussinets. De fait nous chahutions avec
elle comme le font les lionceaux avec leur mère.
Les chats savent qu’un
coup de griffe ne met pas votre vie en danger, les lions, conscients de
leur force, sont beaucoup plus précautionneux, Ils savent qu’un
coup de patte peut-être fatal.
La victoire incertaine, nous prenions l’avantage tour à tour maintenant le suspense à son comble. Enfin Belle nous renversa une dernière fois et les convives qui n’étaient pas à une incohérence prêt, pointèrent le pouce vers le bas, et pour une fois c’est la bête qui vainquit les gladiateurs…Belle et moi, jeux heureux et pattes de velour
L’énervement nous
gagnait car nous avions beau appelé, demander que l’on s’écarte
pour nous laisser passer, rien n’y fit. Lorsque, d’un sanglier, une coulée
de graisse s’enflamma tel le jet incandescent d’un cracheur de feu dans
la nuit naissante.
Belle, devant cette gerbe
de feu s’effraya et fonça dans la foule. Bien que tout trois solidement
enchaînés, Mon père (100 kg) et moi-même
(70 kg ) essayèrent de la stopper en la plaquant au sol,
en vain.. Elle nous traîna au galop et nous emporta comme une
botte de paille. Dépassé par sa puissance en furie, j’appréhendai
la catastrophe, la boucherie imminente… La rapidité avec laquelle
les grands fauves sont capables de mettre en pièces une proie est
redoutable. Leurs pattes avants armée de griffes sont plus destructeur
que deux fléaux d’arme. Autant les lions peuvent être
pacifiques avec la meute, autant ils peuvent être cruel et
sans pitié si leur territoire ou leur survie en dépend…
La peur au ventre nous
hurlions à plein poumon. Au son de nos cris qui couvraient la sono,
les convives se retournèrent et virent horrifiés la
charge de Belle qui fonçait sur eux. Ce fût une situation
de panique indescriptible, les personnes les plus proche de la piscine
sautèrent à l’eau, les autres se bousculaient en se renversant
les un sur les autres, tel un jeu de dominos. Ce qui fit qu’en un
instant la voie fût presque dégagée, et Belle vit en
point de mire le camion cage, son refuge. Au galop elle sauta par-dessus
trois convives que nous fauchions comme des quilles les expédiant
dans la piscine.
Tiré par la chaîne,
c’est tout juste si nous touchions le sol. Arrivée au pieds
du camions elle avala d’un saut les quatre marches qui permettaient
d’y monter… Comme nous étions enchaîné à
elle, elle nous catapulta à l’intérieur nous faisant passer
par-dessus elle, en nous projetant au fond du camion telle deux pierre
sorti d’une fronde.
Nous étions en
piteux état, égratignés aux bras, aux jambes, nos
costumes râpés par le frottement…Pourtant nos anges gardiens
nous avaient bien protégés, rien de grave ne s’était
produit et surtout aucun convive n’était blessé ce qui nous
dédouanait de payer des dommages et intérêts
jusqu’à la fin des temps.
Nous pensions avoir terni
la soirée, bien au contraire nous dit l’organisateur, « votre
sorti a fait sensation, chaque invité se targue à présent
d’avoir touché du poil de lion, même ceux qui étaient
loin de l’action. Une Fête vraiment inoubliaaaaaaaable !!!!
»
Rien ne laissait penser
à cette époque que je serai contraint d’abandonner le métier
avec mon père. Hélas quelques années plus tard notre
lionne vedette, ma sœur de lait, disparaissait, victime de la maladie de
Carré. Firmin Bouglione par solidarité à notre malheur
nous offrit une portée de lionceaux, un mâle et deux femelles,
nous repartions de zéro.
Lorsque le destin, incarné
par Max, en décida autrement. Max un chimpanzé mâle
nous avait été donné par le Photographe et ami Tony
Kent, quatre ans au paravent. A la même époque un Top modèle
nous donnait un très beau léopard : Bango dont elle
avait peur parce que devenu adulte et dangereux. Adopté, il
vécu heureux toute sa vie chez nous sans travailler, à déguster
ses trois kilos de cou de poulet par jour, ce dont il raffolait. Avec lui
tout ce passait bien en répétition tant que l’éclairage
n’était pas allumé mais force était de constater que
Bango était incapable d’affronter les sunlights. Il avait
été traumatisé dans sa prime jeunesse par les flash
des photographes de mode et les calmants que lui administrait son ancien
propriétaire lors des séances de photos)…
Depuis peu les crises
de dominance de Max s’amplifiaient. Pendant une dizaine de minutes
par jour, elles s’accompagnaient de hurlements, de jets d’objets,
ce qui effrayaient les lionceaux en compromettant tout notre dressage…
Un choix cornélien
s’imposait, et mon père qui s’était attaché à
Max, comme à un fils avait beaucoup plus d’affection pour lui que
pour ses nouvelles recrues. La mort dans l’âme, il choisit
donc de garder son chimpanzé et sacrifice suprême, d’abandonner
le métier pour le garder. Il offrit donc ses lionceaux à
un confrère.
Max quelques mois après son adoption
Il faut dire que Max
notre chimpanzé était très attachant et d’une intelligence
extraordinaire. Ce n’est pas pour rien qu’il n’y a que quelques chromosomes
de différence entre leur patrimoine génétique et le
notre. Leur évolution est d’ailleurs plus rapide dans les deux premières
années et c’est un réel plaisir que de jouer avec eux…. La
capacité de Max à se sentir l’un des nôtres était
troublante. La vue d’une femme en tenue estivale l’excitait, peut-être
était-ce du aux phéromones ? Mais mieux encore, un jour que
j’avais égaré un playboy, je le vis feuilleté la revue
et être excité comme une puce à la vision des images
de papier glacés, preuve de sa faculté imaginaire quasi humaine….
Avec un chimpanzé
mâle, le problème se pose à la puberté. Au fur
et à mesure qu’il sent sa force physique augmenter, il se
met à contester la hiérarchie. Tout d’abord celle des femelles
qui forment dans l’organisation tribale une sorte de harem soumis aux males
dominants dont le chef a droit de cuissage absolu. Puis avec l’âge,
conscient de sa force grandissante (environ deux à trois fois plus
fort qu’un homme adulte, un léopard n’a d’ailleurs pas la loi contre
un mâle en pleine maturité), il se teste face aux mâles
en espérant grimper d’un échelon. Avec le temps, il
essaie de s’élever au plus haut niveau de la hiérarchie.
C’est pour cette raison qu’il n’y a pas de mâles adultes dans les
numéros de dressage de chimpanzés. Trop intelligents et trop
forts, ils sont ingérables en public.
Cela explique sans
l’excuser pour autant le geste de l’ex femme de Léo Ferré
qui, excédée, avait empoisonné Pépé
son chimpanzé. Il est difficile de comprendre l’attachement quasi
filiale que la relation chimpanzé – éleveur génère,
lorsque l’on ne la pas connu soi-même…La douleur de la perte de Pépé
fût si cruelle pour Léo qu’elle détermina sa séparation
définitive d’avec sa femme ainsi qu’une chanson mémorable
« Pépé »
Marbre de carrare 25x35x17cm, collection personnelleMa Belle rugit d'amour.
A la mort de Belle,
en attendant de mettre au point son nouveau numéro, mon Père
gagnait sa vie en travaillant comme videur à la plage de Gournay,
une boite voisine. Cette situation allait devenir définitive à
cause du profond attachement qu’il portait à Max…
Ce n’est que depuis quelques
années qu’en faisant le bilan de ma vie, je constatais que le point
de bascule déterminant de mon destin s’appelait Max !!! De
quoi rendre dubitatif tous ceux qui pensent avoir quelques influences directives
sur leurs destins.
Pour en
savoir plus cliker les rubriques :
If you want to know more,
clik :
Articles de presse, press articles. Articles presse
Catalogue 1 et next page2
:
Sculptures caractéristiques
de ma création.
Biographie
/ main exhibitions
mon parcours artistique
et la liste de mes expositions.
Memo :
un petit mémoire
historique et instructif sur la SuBréalité
de la sculpture.
Wanted – Avis de recherche
:
Wanted
1 - Le mystère
de l’hercule de Michel-Ange dérobée.
2 - Mes prochaines
expositions et exposition en cours
3 - Liens amis et
sites amis
4 - Articles divers sur
l'art contemporain